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jeudi 28 avril 2011

Dans les coulisses de la 25ème cérémonie des Molières

En sortant du métro et en traversant l’esplanade qui mène à la Maison des arts de Créteil, en cette veille de cérémonie, je pensais à toutes ces personnes qui ont œuvré des mois pour que le jour-J soit une réussite.

Les quelques jours qui précèdent la cérémonie, c’est le moment où se rencontrent toutes les énergies. Celle de Didier Long, directeur artistique et metteur en scène, celle de Laurent Lafitte, maître de cérémonie et auteur des textes, celles de Zabou Breitman, adaptateur et metteur en scène du lever de rideau, des comédiens et comédiennes qui vont participer, de R&G productions, etc.

Les coulisses en images, et en mots, c'est par ici !

mercredi 13 avril 2011

Le Maître de Cérémonie de la 25ème Nuit des Molières est : Laurent Lafitte !


Comment êtes-vous arrivé sur le projet de la 25ème Nuit des Molières ?
J’ai dit « oui » sans réfléchir (rires) et je ne le regrette pas.  Mais la pression monte... Je crois que c’est Didier Long, Pierre Lescure et Dominique Segall qui ont proposé mon nom aux Molières et à France 2. Comme personne ne veut s’y coller, ils ont dit « oui, très bien ! ». Je crois aussi que cette année, ils voulaient que ça soit les comédiens qui prennent la parole.
Pourquoi j’ai dit oui ? Parce que les Molières, je trouve que c’est un moment important dans le théâtre, ça fait partie du métier. C’est un moment où on célèbre tous les créateurs de l’année, où on parle de théâtre à une heure de grande écoute. Et puis il y a de quoi faire ! On part d’une cérémonie très didactique : des animateurs télé remettent un enchaînement de prix, de manière un peu expéditive. Comme il y a un vrai désir de faire quelque chose de différent cette année, c’est sympa parce que je n’ai pas à rentrer dans un format. La liberté de ton a l’air totale, donc ça m’amuse.

Comment faites-vous pour préparer votre rôle de maître de cérémonie ?
J’écris tout seul, pour le moment. Je ne vais pas renouveler la forme. De toute façon, ça restera une cérémonie de prix. J’ai un humour un peu moqueur, un peu cynique, donc je ne veux pas me freiner là-dedans. Je vais essayer, sans blesser personne, de m’amuser avec les codes, de m’amuser avec le clivage privé et public.

Ce clivage, il a une réalité pour vous ?
Je navigue entre les deux. J’ai été formé au Conservatoire, j’ai travaillé dans le subventionné, dans le privé aussi, j’ai fait du one man show, j’ai fait du cinéma, même de la comédie musicale, plein d’univers différents. Donc je ne me sens pas, moi, victime d’un clivage. En revanche je sens qu’il existe, même si ça a tendance à s’estomper. Quand on voit les collaborations qui peuvent se mettre en place entre le Théâtre du Rond-Point et le Marigny… Mais, déjà quand Gildas Bourdet était à la Criée, ses créations étaient jouées au Théâtre Hébertot.

Vous avez regardé la cérémonie les années précédentes ?
J’avais regardé l’année où nous étions nommés avec Zabou pour Des Gens. Il y avait des trucs marrants mais j’ai trouvé que c’était un peu improvisé. Moi j’ai envie de quelque chose de très carré. Il y a suffisamment d’éléments qu’on ne contrôle pas - qui gagne, qui vient parler et combien de temps - que tout ce qu’il y a autour, il vaut mieux que ça soit bien calé. Donc j’écris tout, réplique par réplique. Ensuite, avec les comédiennes qui me rejoignent, on va s’adapter pendant les répétitions. Mais je veux vraiment une base où tout est scénarisé et écrit.

Ces comédiennes, ce sont :
Judith Magre, Mélanie Doutey et Valérie Bonneton.
Il y a aussi certains Molières que je vais remettre avec Guillaume Gallienne. Il y aura donc quatre personnes qui viennent me retrouver sur le plateau, en plus d'une remettante pour le Molière d’honneur, un remettant pour la comédienne, et une remettante pour le comédien.
Il y aura quand même pas mal de passage, on ne verra pas ma trombine pendant 1h15 !
Et pour les lauréats qui parlent trop longtemps, j’ai une menace. Je ne vais pas vous la révéler mais c’est un outil de menace assez dissuasif. 

Comment êtes-vous venu au métier de comédien ?
Le métier de comédien ? Je ne me souviens pas de m’être réveillé à un moment donné et de m’être dit « je vais faire ça », parce que j’ai l’impression de ne m’être jamais dit autre chose. Ça a toujours été ça, de manière plus ou moins assumée ou avouée, mais ça n’a jamais été autre chose. C’est l’envie d’être sur scène, de raconter des histoires, de faire rire les gens. C’est l’envie aussi de vivre des histoires, une envie de liberté. C’est un mélange d’envie de liberté et un truc psychanalytique. Peut être que les comédiens ont envie d’être plus aimés que les autres, et c’est peut être ça qui les rend odieux… En tous cas, le plaisir de jouer, ça c’est sûr, de continuer à jouer, comme quand on est gamin. Il y a peu de métiers où on dit "jouer".

L’écriture, c’est venu avant ou après cette envie de jouer ?
L’écriture, c’est plus une envie de liberté et d’autonomie. Quand on est comédien, on est très dépendant de toute une chaîne de création. On arrive vraiment en bout de piste. C’est quelque chose qui m’a toujours un petit peu gêné. J’ai toujours eu envie de prendre les choses en main, de ne pas attendre de susciter le désir chez les autres créateurs. C’est venu de là. Et puis le désir aussi, en tant que comédien, de m’écrire des trucs sur mesure, de m’écrire des trucs que personne ne me proposerait jamais. Ce que j’ai fait avec le one man show.

Lorsque vous n’êtes pas à l’initiative des projets, comment les choisissez-vous ?
C’est un mélange de plein de choses. C’est évidemment l’œuvre à défendre, l’écriture à défendre. Et puis beaucoup les gens avec qui ça se fait aussi. Parce qu’un texte sublime avec un metteur en scène qu’on ne sent pas trop, un peu autoritaire, ou des partenaires avec qui on n’a pas d’affinité, ça peut devenir un cauchemar.  Surtout au théâtre où on se voit tous les soirs, pendant très longtemps, où on part en tournée… donc c’est un mélange de plein de choses mais il y a beaucoup d’humain.
J’ai besoin de sentir que le metteur en scène est client de ce que je vais lui proposer. J’ai besoin de sentir qu’il sait ce qu’il veut et que, dans ce que je vais lui proposer, il va faire son marché. J’aime bien travailler dans la proposition. Un metteur en scène peut être directif sans être autoritaire, c’est un équilibre. Mais le metteur en scène gourou, ça me gonfle très vite. Déjà, en cours, il y a des profs un peu gourous, et les élèves ont l’impression d’être dans une secte… ça m’a toujours gonflé.  Je n’ai pas envie d’être avec un grand manitou. Par contre, c’est son entreprise, on est à son service, et en tant qu’acteur c’est vraiment important.


Justement, quand vous étiez à l’école, vous êtes parti en Angleterre. Racontez-nous.
J’adore Shakespeare. Je voulais travailler Shakespeare en anglais. Au Conservatoire, j’avais la possibilité de partir faire ma troisième année là-bas. J’ai pris une école qui avait aussi une spécialisation comédie musicale parce que je voulais travailler sur la voix, le corps, la danse. C’est un répertoire qu’on n’utilise pas beaucoup en France, qui n’est pas beaucoup monté. Mais il y a de très belles choses, surtout du côté anglo-saxon parce qu’en France, après l’opérette, il n’y a pas eu ce relais. C’est très théâtral et très très riche du point de vue dramaturgique. Je voulais explorer tout ça et, en France, ça n’était pas possible. Donc j’ai fait ma troisième année de Conservatoire là-bas. Mais je ne serais pas parti à l’aventure. Je l’ai fait parce que j’étais dans une structure…
La manière de travailler là-bas est différente mais le résultat c’est qu’on a tous envie de faire de beaux spectacles. J’ai senti, en Angleterre, un rapport à ce métier différent : une sorte de pragmatisme, moins d’affect. C’est un peu moins cérébral qu’en France. On est plus comme un artisan, peut être un peu moins torturé. Après, ça dépend avec qui on travaille ! ça n’est pas la même chose de monter une comédie musicale dans le West End  et de travailler sur Sarah Kane… Ça dépend des répertoires, mais de manière globale, il y a quand même une approche pragmatique de ce métier que j’aime bien. Il faut travailler : on travaille, on arrive à l’heure, texte su. On répète moins longtemps mais on ne passe pas 10 jours texte en main. C’est un détail mais c’est assez représentatif de l’état d’esprit.


Vous avez d’autres souvenirs de votre apprentissage ?
Dans l’apprentissage, tout a été bénéfique de manière différente. Quand j’ai fait Florent, je n’ai pas appris la même chose qu’au Conservatoire avec Muriel Mayette et Philippe Adrien. Mais j’ai toujours été intéressé par ce qui se passait. Le Cours Florent, c’était oser être comédien et oser prendre ça comme une possibilité de vie, réaliser tout ce que ça implique. Le Conservatoire, c’était plus une notion d’exigence. Etre comédien, ça pouvait vouloir dire avoir une responsabilité sociale, voire politique. C’est ça qui m’a construit.


Le cinéma, la télévision, c’est un travail qui vous plaît aussi ?
Le cinéma, j’en ai fait avant de faire du théâtre, des petits rôles par-ci par-là. J’ai toujours alterné entre cinéma, théâtre. Mais au théâtre j’ai plus eu à manger…
J’ai fait un petit peu de télé quand j’avais 20 ans, pour m’amuser. Ça fait partie des choses qui m’ont permis de me rendre compte qu’il fallait être sélectif dans ses choix, qu’il fallait faire des choses qui me correspondent. Parce que s’il y a une dichotomie entre ce qu’on fait et ce qu’on est, on n’est pas heureux, même si on a du succès.


mardi 12 avril 2011

Christian Hecq : " Y remettre de la vie"


Un peu à l’écart de la salle bruissante du Ministère de la Culture où sont reçus les nommés, Christian Hecq, moliérisé en 2000 et nommé cette année, nous parle de...


Feydeau et d’Un Fil à la Patte...
J’aime bien Feydeau. La folie de Feydeau me plaît. Mais il n’y a pas que lui qui me parle profondément. C’est juste que le hasard fait que j’ai joué Feydeau dans des spectacles qui étaient exposés. Que ce soit à Chaillot ou à Richelieu, ce sont des lieux qui sont exposés. Le fait d’être exposé joue aussi pour les Molières.
Pour cette mise en scène, Jérôme Deschamps s’est fortement inspiré de la mise en scène de Jacques Charon. Moi je me suis abstenu de regarder la trace filmée de ce Fil à la patte avec Robert Hirsch. Je suis un grand admirateur de Robert Hirsch. J’avais peur d’être trop influencé, d’être bloqué par mon admiration.
Une fois que les marques ont été prises, je me suis dit : « je vais me payer le luxe de regarder ». J’ai été extrêmement impressionné par Robert Hirsch. Les autres acteurs aussi, bien sûr, mais en ayant interprété Bouzin, je focalisais beaucoup sur lui.
Dans un projet, il y a plusieurs choses importantes. Parfois c’est difficile de les réunir toutes. Il peut y avoir le désir de travailler avec tel ou tel partenaire, il y a des attirances envers des metteurs en scène, et des attirances envers des textes et des auteurs. C’est très difficile de réunir les trois. Dans Un Fil à la Patte, il y avait plusieurs facteurs remplis : le personnage me plaisait beaucoup, le metteur en scène et les partenaires.



...et de ses inspirations :
Je fonctionne un peu à l’envers. Je suis plutôt gestuel que verbeux, donc je me pose la question sur la manière de bouger du personnage, et après sa manière de parler suit. Je me demande quelle est sa démarche, sa posture, ses manies gestuelles, comment il se comporte physiquement, et ensuite le reste vient.
Il y a des gens qui ont une mémoire auditive. Moi j’ai une mémoire visuelle. Le visuel me marque plus. Quand je vois quelqu'un danser, bouger, je peux le reproduire plus facilement. Il y a des imitateurs qui sont forts pour la voix, qui peuvent reproduire le timbre d’une voix. Moi je suis plus impressionné par la manière de bouger. Une démarche, pour moi, ça raconte beaucoup de choses.
C’est difficile de parler consciemment de tous les gens qui m’ont influencé… Mais nous ne sommes que des copieurs. Selon les individus, on prend un peu plus d’untel et un peu moins d’untel. J’ai rencontré des metteurs en scène qui m’ont fasciné : Benno Besson, qui est décédé maintenant, Daniel Mesguich, le premier qui m’a fait travailler en France… J’aurais du mal à tous les citer… C’est plein de petites fractions qu’on prend et qu’on met ensemble. On essaie de faire une musique avec tous ces acteurs qu’on a aimé… C’est vrai que la technique du mime est quelque chose qui me passionne. La technique d’Etienne Decroux m’a passionné, me passionne. Mais je n’aime pas la finalité du mime, je l’aime comme outil, une chose à utiliser avec précaution.  Ca peut assécher un acteur. Un mime pur pour moi est trop sec, il faut y remettre de la vie. C’est juste une technique. Le tout est de savoir à quelle dose on l’utilise.
Ce qui m’inspire ce sont les gens qu’on croise aussi dans la rue. C’est une source intarissable, les silhouettes qu’on voit. Les gens avec lesquels on s’assoit dans le métro, aux terrasses des cafés, ce sont des inspirations directes. Il y a deux types d’inspirations : les inspirations directes que sont les gens qu’on rencontre, et puis les artistes, qui ont déjà transposé leurs inspirations.
Au départ je ne voulais pas faire ce métier-là du tout. Je voulais être physicien. A l’école j’ai toujours été attiré par les sciences. J’étais très mauvais en français et en langues. Tout ce qui est littéraire, je suis une  « brèle ». La physique est ma branche préférée. Donc j’ai commencé mes études de physique et les cours me passionnaient. Mais le milieu dans lequel j’étais me déprimait profondément. J’avais mal choisi, sans vraiment bien comprendre quoi. Et c’est l’inverse des histoires habituelles : c’est ma maman qui m’a conseillé de me présenter à l’examen d’entrée de l’Institut des Arts à Bruxelles.



lundi 11 avril 2011

Interview éclair avec Zabou Breitman

Entre deux répétitions du lever de rideau des Molières 2011, au cours de cette période d'apnée dans le texte et le jeu qui précède la première et unique représentation de Jeux de scène, Zabou Breitman répond à une interview éclair :

Un premier souvenir de théâtre :

- Le mime Marceau

Le Mime Marceau



- Mes parents qui répètent en plein air un spectacle sur Jeanne d'Arc, dans lequel j'ai un petit petit rôle




Des rencontres importantes :

Après mes parents, leurs collègues ou amis, (Fernand Bellan, Robert Rollis, Jean-Claude Drouot, Fernand Basile), LA rencontre avec Roger Planchon, quand j'ai joué dans Dandin au TNP.

Roger Planchon


Les projets :

Le choix d’un projet, c'est plus un élan qu'un choix cérébral. C'est sous-tendu par un millier d'envies claires ou obscures, comme si le projet avait toujours existé, et devenait soudain vital.


Deux Molières

Une grande joie, un peu de fierté, la conscience de l'aléatoire de ce type de récompenses. Mais je n'ai pas gagné un 100 mètres !



Des textes forts

J'ai interprété Marie N'diaye et David Hare. Je n’ai pas adapté ni mis en scène leurs textes. C'est différent. Mais j'aime la puissance de ces écritures, la force humaine, la violence ou l'humour, l'humanité profonde qui s'en dégagent.


Le défi multiple du lever de rideau des Molières

- Jouer, d’autant plus dans une comédie délicieusement cruelle
- L'idée d'un double direct, sur scène et à la télévision
- La nature de la pièce « Jeux de scène » qui parle autant aux professionnels qu'au premier spectateur venu
- L’envie de légèreté, et d'un petit coup d'adrénaline...


Le travail sur Jeux de scène

On s'en donne à cœur joie avec Léa (Drucker) ! On se jette. La mise en scène devient de plus en plus visuelle. On verra avec le réalisateur comment faire passer certaines situations drôles sur le temps, l'apnée, le rythme. On y croit, et on y met beaucoup beaucoup d'énergie !

Léa Drucker et Zabou Breitman


Rendez-vous le 17 avril pour voir le résultat !

mercredi 6 avril 2011

Victor Haïm, auteur enragé


Victor Haïm n’est pas prêt à prendre sa retraite. D’ailleurs, pour lui, être écrivain n’est pas un métier, c’est une passion. Passion qu’il vit avec fureur depuis plus de 60 ans. Avec quelques 54 pièces, il est l’auteur d’une œuvre engagée, qui croque l’époque avec humour.

A 7 ans, la guerre fait rage et il est caché dans la cave d’un collège catholique quand il assiste à sa première représentation de théâtre amateur. Dix ans plus tard, il entre au Conservatoire de Nantes avec l’envie de devenir comédien. Il y travaille Musset, Molière, les classiques. « Monté » à Paris pour finalement intégrer une école de journalisme, il commence à écrire.


« J’écris parce que j’ai beaucoup de choses qui me turlupinent, d’obsessions, de rage, de colère, d’amour, d’anecdotes, de rencontres, de femmes, d’amis. Tout ça me nourrit. Mais malgré tout, on retrouve dans toutes mes pièces le thème de l’humiliation des êtres humains par d’autres êtres humains.
C’est sûrement par expérience personnelle. J’ai vécu tellement de choses depuis l’âge de 7 ans où en général on est insouciant, on pense à jouer aux billes et au ballon. Moi, j’ai dû me planquer pendant quatre ans, avec ma famille. J’ai vécu des choses assez dures. Je n’écris pas uniquement pour rigoler, mais je veux qu’on rie, qu’on s’amuse à toutes mes pièces. Je veux que ça soit distrayant mais ça n’est pas le but. C’est le moyen de faire passer des choses. La dernière pièce au petit Hébertot (Fureur), les gens m’ont dit «  c’est horrible mais qu’est-ce que j’ai ri ». C’est le but de la manœuvre.